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Solar Ranks
7 janvier 2010

(Kurall)

Base Titan – Titan.  - 2160.   Réunion de crise.

 

Une quinzaine d’officiers du haut état major de la Flotte Jovienne, avaient réuni les forces rebelles de Base Titan. Ils essayaient tout à la fois de faire le point de la situation et de voir comment reprendre les affaires en main à terme. Une cinquantaine de chefs mutins leur faisaient face, attentifs, réceptifs et déterminés. La question de l’éventualité d’une attaque par actifs nanos venait d’être traitée.

 « Rien à craindre de ce côté. Tant que nous pouvons manipuler le signal dans les locaux que nous contrôlons, ils seront aveugles sourds et muets. La communication entre eux et les actifs ne passera pas. Pour le champ de force en revanche, je ne peux rien faire ! » Expliquait Ser Jamsaya. « Je ne suis pas le bon dieu. » Précisa t’elle.

 « Vous pouvez entrer dans leur système informatique, explorer leurs noyaux Vaev, infiltrer leur comms. » Hasarda un Général  3 étoiles à l’impeccable brosse gris fer.

 « Tout cela ne veut rien dire sauf votre respect, Sir… Si j’y entre mais que je ne peux rien y faire à part leur fournir des armes qu’ils retourneront contre nous, je n’y entre pas. »

 « Donc leur champs de force va rester en place. »

 « Je le crains. »

 Les Officiers d’état-major se tournèrent alors vers les Vestales Lysistrates.

 « Vous dites que vous ne pouvez rien vous non plus, Sers ? »

 « Une de nos hautes sœurs est là dedans avec eux, monsieur. Tant qu’elle peut intervenir sur les générateurs de champ, elle saura le maintenir. Quoique nous tentions de notre coté. »

 « Pensez vous que cette Vestale est consentante ? » Interrogea un des vieux birbes galonnés.

 « Impossible à dire, monsieur. Il y’a de nombreux moyens de forcer une personne à obéir, les hautes sœurs Lysistrates ne font pas exception. Nous avons tous vu ce que les ennemis ont déjà fait subir à l’une d’entre nous.»

 Un net tohu-bohu parvint aux oreilles de la petite assemblée. Trois individus tentaient d’entrer dans leur salle de conférence. Un appariteur vint parler à l’oreille de quelques participants. Le Général trois étoiles adopta un ton prévenant pour annoncer :

 « Il semblerait que les trois gentlemen de la Flotte qui sont à l’entrée veuillent nous soumettre une idée, mesdames et messieurs. Qu’en pensez-vous ? »

 « J’en pense, que votre formalisme est ridicule. » - dit en se penchant vers lui de côté le Général 2 étoiles Sven Svenson qui était au bout de la rangée des officiers d’état-major.  

 « Laissez les passer, soldats ! » - Gueula t’il en direction des portes.

 Deux hommes et une femme en uniformes de la marine spatiale mauve s’approchèrent. Leurs  barrettes indiquaient qu’ils appartenaient au secteur d’unités Encéladus/Cassini. Leur officier, un Commandant à la barbe rousse, au cheveu ras, pris l’assistance à témoin. En tournant le doigt pointé sur 360° pour interpeller chacun.

 « Vous réfléchissez au problème créé par le champ énergétique n’est-ce pas ? » déclara t’il en russe d’une voix de baryton ?

 Devant leur enthousiasme à l’entendre poursuivre, il reprit, à l’adresse de la brochette de hauts gradés.

 « Nous savons comment faire ! Il faut contourner le champ, et déboucher dans leur dos en forant la roche.» Il passa ses doigts dans sa barbe fournie pour contempler à loisir l’effet de ses paroles sur les officiers mauves.

 Leurs visages passèrent par diverses expressions peu approbatrices - Le trio d’énergumènes leur faisait perdre leur temps ! - Le rouquin ne leur laissa pas le temps de récupérer de leur surprise indignée. Il montra de la main trois personnes dans la foule des chefs mutins. Et en choisit une.

 « Vous, Générale Gerboise, dites leur que nous pouvons le faire ! »

 Ser Jamsaya lorsqu’elle avait visité en cachette le chantier clandestin des Terriers sur Encéladus il y a un an, avait prétendu que tel était son nom aux équipes de foreurs martiens. Les marins Joviens qui vivaient avec eux de temps à autre ricanaient et n’avaient rien fait pour les détromper. Le Vert restait malgré tout un adversaire pour eux. Les engagements entre les nefs martiennes et les leurs, on l’a vu, n’avaient pas été des joutes d’eau entre bateliers un peu ivres. Donc : autant d’embrouilles autant de gagné. La Générale Jamsaya prit son courage à deux mains. Elle s’avança et se retourna devant l’assistance qu’elle prit à témoin.

 « Cet homme dit la vérité ! Ils peuvent creuser plus vite et plus efficacement que tout ce que nous connaissons. Et en silence ! Ce qui est primordial. Du moins je les ai vu le faire.»

 Une grosse houle parcourut la cinquantaine de chefs rebelles.

 « Ce sont des Taupes alors ! » Cria quelqu’un dans l’assistance. « Donc des Verts ! » Ajouta t’il d’une voix courroucée.

 Le rouquin se tourna du coté d’où venait la voix. Ses deux acolytes, un Rank asiatique et une fille aux cheveux mauves scrutaient aussi la foule, cherchant celui qui avait parlé.

 « Montrez votre bobine que je vous réponde, s’il vous plait. » demanda t’il finalement.

 Un officier sortit de la foule, l’air fier. Bras croisés sur une poitrine bardée de décorations. Le commandant roux à la voix roulante s’adressa à tous.

 « Je suis contre les gens derrière ce champ de force, comprenez-vous ? Le reste - tout le reste ! - me fait autant d’effet qu’une climatisation à un frigo bien fermé. Donc, si je suis une Taupe - et j’en suis fier -, que mes deux compagnons ici présent sont de bons foreurs, je vous propose d’aider à finir le travail ici. Suis-je clair ? » Dit-il en plissant les yeux sans se démonter.

 Une seconde vague de brouhaha parcourut la foule.

 « Vous avec amené un tunnelier dans votre poche ? » Leur cria un aspirant qui voulait faire son malin. C’est le Rank 3 asiatique du trio qui lui répondit cette fois.

 « Tu as déjà enfilé un tenue répulsive anti-nano ? » demanda t’il vivement à l’aspirant.

 « Oui bien sur ! On a ça, nous aussi, qu’est ce que tu crois ?!»

 « Alors si tu en trouves une, je t’invite à venir voir. » l’assura Nam.

 La jeune femme Ranke 3 s’avança vers les Officiers d’état major. Son auréole de cheveux mauves qu’elle avait crêpés étincelait dans la lumière électrique. Ses yeux verts et ses paupières rehaussées d’un zeste de bleu violet firent automatiquement focaliser certaines têtes sur ce qu’elle faisait et/ou disait.

 « Si vous pouvez monter un double sas contre la paroi, nous vous indiquerons où le faire. » Dit-elle en écartant les bras, telle une pythie antique qui se serait déguisée en cyber Pin-up.

 Un tiers des officiers d’état-major, ceux qui croyaient venu le moment de réaffirmer leur autorité et leur emprise sur les hommes et sur les événements en furent pour leurs frais. Cinq d’entre eux, donc, ne le supportant pas, firent de l’obstruction. 20 minutes plus tard, on les coffrait poliment, sous clefs, dans leurs luxueux appartements.

 

Lybla resta avec les techniciens qui montaient le sas double contre la paroi rocheuse au 3ème sous-sol. Elle vérifia que leur travail ne serait pas épié sans qu’ils le sachent. Nam et Kurall étaient partis chercher leur matériel, planqué dans un hangar de fret. Le jeune enseigne de vaisseau qui aimait l’humour les rejoignit avec une tenue répulsive de fabrication jovienne. Ils fermèrent le sas extérieur. Après l’avoir inspecté Kurall demanda à l’enseigne, qui s’appelait Sialvo, d’ôter son scaph. Il en sortit un autre, de facture martienne et le lui tendit.

 « Mets ça ! Sinon le frottement va te faire prendre trop de risques. Avec celles-ci tu peux même essayer de déchirer l’enveloppe avec une lame, tu auras du mal. ». Ils finirent tous de s’équiper et enclenchèrent les champs répulsifs.

 Ils avaient tout. Ils sortirent leurs nano sculpteurs de 3ème génération et passèrent leurs bras dans les manchons. Lybla avait les deux mains passées dans deux outils. Sialvo les regardaient régler les engins, Kurall s’appliqua aux règlages des 2 Sculpteurs de la Ranke 3. Lybla s’approcha ensuite de la paroi d’un pas souple. Elle fléchit les cuisses, leva le bras et posant un outil sur la paroi au niveau du sol avec son autre main, elle traça une rainure de 40 cm de profondeur en forme de cercle autour d’elle. Au moment où sa main finissait le geste, l’autre main reprenait l’action en sens inverse. En une heure à eux trois ils forèrent 40 mètres d’un tunnel assez large pour deux personnes de front.

 « Vous voulez essayer ? » - Demanda Lybla par radio casque à l’aspirant Syalvo.

 Il essaya. Et, avec un seul outil, il fit de rapides progrès. Ils continuèrent leur progression à 4. En cinq heures ils avaient élargi et avancé d’une centaine de mètres. Les niveaux souterrains de Base Titan couvrant à peu près quatre à cinq étages chacun, il y’avait du pain sur la planche. Ils sortirent pour prendre une pause.

 « Je me tairais sur les détails je vous le promet » Leur dit Syalvo avant les sas, enthousiasmé par cette expérience. Kurall le regarda en se tirant la barbe, il dit à Nam : « Tu as bien fait ! Ça aurait été dommage de ne pas lui clouer le bec.». Nam cligna de l’œil à l’aspirant Syalvo.

 ………..au même instant dehors………………..

 Des bourrasques d’azote et  de méthane en suspension giflaient les carlingues. Le froid du canyon au-dessous d’eux avait englué la plupart des sondes Pexs. Ne restaient plus que les engins les plus lourds et ceux qui avaient la garde au sol la plus haute. Deux transports d’oxygène étaient restés coincés dans la boue visqueuse de gaz gélifiés derrière eux. Les embruns d’acides, alliés au choc thermique du froid des fonds de vallée allaient sous peu fendiller leur coque et l’oxygène ainsi libéré se mettrait à réagir chimiquement pour composer des émanations d’une toxicité que même Titan ne connaissait pas d’ordinaire.

 Les pauvres humains en scaphandres, lorsque par malheur pour eux ils se trouvaient dans l’obligation de sortir en personne sur la surface du satellite, évitaient de laisser sortir le surplus de leurs mélanges respiratoires à l’extérieur de ceux-ci. Il n’était pas prudent d’apparier ensemble les chimies à base d’azote et de méthane d’ici avec celles liées à l’élément qu’ils appelaient Air. Les résultats, d’une couleur en général cauchemardesque, gardaient un pouvoir létal qui pouvait bien subsister jusqu’aux sas d’ouverture des scaphs lourds. Collants ou instables, se libérant en gaz délétères ou bien fusant comme des artifices de foire, ils avaient déjà tué plus d’un être à sang chaud qui pensait imprudemment être enfin sorti d’affaire parce qu’il avait franchi des sas. Si l’atmosphère de Titan était plus que pénible et plus riche en surprises qu’on aurait pu le croire avant d’y être, la confrontation entre elle et les fluides principaux que connaissait Terra donnait des résultats foudroyants, en général résolument et rapidement mortels. Encore quelques dizaines de kilomètres et les gros engins d’acier et de carbone qui avaient survécu à la traversée toucheraient enfin au but.

 Dans leurs caissons, les quinze corps, veillés par le dernier carré des défenseurs au plus profond du Plot 8 de Base Titan, reposaient immobiles. Quinze esprits, hantés par l’image de leur possible perte, se concentraient sur les Pexs, leurs dernières chances de sauver leur peau. Les autres colonnes de Pexs avaient suspendu leur avance, les Opérateurs avaient dû être réduits au silence. Il ne restait plus qu’eux.

 Les véhicules arrivèrent enfin en vue de la Base, ils les dirigèrent vers le sommet des collines dans lesquelles étaient enfouis les Plots. Contournant les champs de force qui protégeaient les structures externes, les engins commencèrent à creuser vers le béton enfoui. Ces grosses machines avaient leur propre système Vaev, elles embarquaient leur informatique. Le brouillage signal resterait sans effet sur elles. Les toupies blindées d’acier des Plots les attendaient. Ils commencèrent par les Plots autres que celui d’où ils dirigeaient la manœuvre. Même à eux, ce qu’ils s’apprêtaient à faire donnait la chair de poule. Ce serait leur dernière erreur.

 ………..section hospitalière protégée, niveau intermédiaire………………….

 Fatou Jamsaya se penchait sur Suong, essayant d’entendre ce que la jeune femme lui disait. Le poumon perforé de la jeune watcheuse avait été soigné et les agents reconstituants lui parvenaient par une unité biotech automatisée suspendue à l’indémodable baxter.

 « C’est vrai que des Taupes sont ici ? » demandait elle dans un souffle rauque.

 « Oui, ils sont trois. Ils nous aident à surprendre ces vieux saligauds. » Répondit Fatou.

 La Générale ne lui précisa pas combien elle espérait que toute cette histoire se règle vite et sans bain de sang supplémentaire.  « A la Burkinabé ! » - ne put elle s’empêcher de penser.

 « Est-ce que l’un d’entre eux est asiatique…comme moi ? »

 « Oui, un jeune Rank 3. C’est vrai que vous lui ressemblez, dites donc. »

 « Ils viennent du satellite Encéladus non ? »

 Jamsaya allait de surprise en surprise avec cette jeune Ranke 3 rencontrée il y’a quelques heures à peine.

 « Vous êtes au courant de plus de choses que je ne l’aurais imaginé. Oui, d’Encéladus. »

 « Alors c’est mon frère, c’est Nam. Je voudrais le voir Ser Générale. »

 La Générale reprit le dessus. Elle gronda sa subordonnée.

 « Les docteurs veulent que vous dormiez,  Mlle Nguyen. »

 « Dites lui que je suis ici et que je vais bien. N’est-ce pas ? Les toubibs ne me mentent pas, n’est-ce pas, Ser…Fatou ? »

 La jeune femme replongeait dans le bouillon. La Ranke 2 Burkinabée se promit de ne rien oublier de ce que Suong lui demandait.

 « Non ma jolie. Ça va aller. Tu es sortie d’affaire. Ce 9mm ne t’aura pas tuée. Dors maintenant. »

 « Vous lui direz? »

 « Dors. »

 C’est quand Suong sombra enfin, complètement assommée par les calmants, que retentit la sirène et que les cris s’élevèrent.

 « Les Pexs arrivent ! Ils arrivent ! »

 

L’évacuation commença aussitôt. 

 

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  • Texte de science-fiction/anticipation. Les siècles prochains l'humanité sera t'elle moins stupide que pendant ceux qui ont précédé ? Quelques parcours humains, animaux et végétaux en 700 pages.
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