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Solar Ranks
22 décembre 2009

(viaje)

 

(Les années vingt et les années trente)

 

Deux stations relais égrenées sur leur trajet jalonnaient les chemins vers la Planète rouge. Les spetz savaient que la première d’entre elles serait encore tenue par des fonctionnaires loyaux à la Charte. Ils avaient prévu de la contourner. Les rebelles avaient en revanche des gens à eux sur la seconde, vers laquelle le cap fut mis. La moitié des occupants de la station, ceux qui craignaient d’être trop inquiétés à leur retour sur Terre, embarquèrent avec eux. Il ne leur restait plus que sept mois avant l’orbite autour de la destination finale : Mars.

 La Charte avait d’abord essayé de persuader la petite centaine de scientifiques de chaque mini base martienne de refuser aux mutins l’accès à leurs installations. Mais une fois qu’il devint évident que le voyage en forme de Trek des colons vers Mars continuerait son cours, les responsables chartistes s’étaient ravisés. Sur les nefs de la Flotille dissidente, les escouades Lysistrates s’entraînaient sans relâche. Une obstination dans le refus d’accès ne pourrait servir qu’à livrer des combats stériles et à sacrifier des vies pour un résultat quasiment nul. Les scientifiques seraient plus utiles comme moyens de surveillance éventuels des menées rebelles. Ainsi raisonnèrent les Caciques de la Flotte de Jupiter, eux aussi.

 Deux mois après leur arrivée, les équipes de forage, atterries avec les premiers contingents, fignolèrent l’installation de 9 tunneliers sur le sol martien. Trois autour de chaque base. Puis, Issa et les Taupes, ainsi qu’ils se désignaient eux-mêmes ouvertement, commencèrent leur travail d’excavation. En trois mois le volume total disponible dans le sous-sol de la planète rouge fut multiplié par 15.

 Les équipes de spécialistes en écologie se mirent au travail.

 Ouriage et sa nef reprirent le chemin de Rotation vers Terra avec un équipage réduit. Les Taupes, inlassables, continuaient à percer de nouvelles cavités. Des excavatrices rapides chargées de relier par tunnels les cavités de chaque région colonisée fonçaient à travers les roches martiennes. En général le système comprenait quatre niveaux successifs de cavités. Les unités industrielles de recomposition moléculaire tournaient à plein régime pour produire l’air et l’eau juste en dessous de la surface. De vastes champs de capteurs solaires nouveaux modèles poussaient comme des tapis de lichens sur le sol martien. Des Pexs spéciaux se chargeaient de les étendre au fur et à mesure de l’avancée des travaux. Au deuxième niveau se trouvaient les ruches d’habitation. Il était prévu que les colons descendent dans le niveau du dessous dès que le modelage des écosystèmes aurait suffisamment avancé. Le processus démarra vraiment juste au moment où la grosse nef d’Ouriage était acculée, puis détruite, entre Luna et Terra. Les nouvelles de la poursuite qui durait depuis 2134 électrisaient l’atmosphère. Les esprits des colons étaient sombres. Les Mauves – maudits soient-ils – allaient selon toute vraisemblance, à présent, se retourner contre leur colonie !

 La grande et altière Ouriage s’était fait descendre par une soi-disante Patrouille. La Flotte Jovienne n’avait effectivement pas du tout accepté leur acte de piraterie. Des patrouilleurs avaient été envoyés qui surveillaient à présent les abords de Terra-Luna afin d’y faire respecter les directives de la Charte. Le transport de 5000 places s’était fait proprement atomisé. Ouriage n’aimait pas qu’on la prenne de haut, ni son équipage, et leur nef était à vide. Ils avaient louvoyé pendant près de six mois jusqu’à la destruction finale. La Charte n’avait pas donné suite. Le gros Transport avait été abattu au terme d’une traque de plusieurs mois à travers le système solaire. La responsabilité des Joviens était flagrante. Les alliés terriens des dissidents portèrent l’affaire devant la juridiction spéciale de la Charte, en interne. – (Deux ans plus tard, lors d’un second procès retentissant, Xu serait démit de ses fonctions pour la Charte. Il exultait à sa sortie du box. « N’avoir rien fait et être les victimes que voulez vous de plus ? » Dirait-il dit en partant aux colons Verts martiens.) - Sur Terre, Xu et leurs alliés se démenaient pour l’heure comme des diables pour empêcher La Charte de trop privilégier les Joviens. « Nous ne faisons que ce qui aurait été entreprit quoiqu’il en soit. Les patrons de La Flotte Jupiter et Titan – Cassini, avec leurs Oukases, feraient mieux de prévoir comment ravitailler aussi nos courageux colons au lieu de songer à leur faire un mauvais sort ! » Tempêtaient les pro Martiens aux tribunes.

 Là-bas, sur Mars, les premières grandes cavités se tapissaient en hâte de leurs formations climaxiques. Les colons commencèrent à s’y consacrer, en vue d’élaborer les meilleurs systèmes dynamiques de croissance des futurs écosystèmes artificiels, sous trois cent mètres de roche. Et, sans relâche, les Tunneliers grignotaient l’épaisseur de la croûte planétaire pour y ajouter de nouveaux utérus souterrains.

 Les deux bâtiments d’accompagnement de leur Rush continuaient à tourner en orbite. Tous les mois, l’un d’eux se portait en avant et, s’éloignant un peu plus, surveillait le vide cosmique alentour. Les Forces armées Vertes disposaient déjà de quelques petits navires de combat et d’une quarantaine de « guêpes » ainsi que les pilotes Lysistrates appelaient leurs premiers intercepteurs vectoriels spatiaux.

 Le coup d’éclat futur de Xu n’était en rien le résultat de vagues rodomontades, le vieux Général avait contacté Zdenka, première officière dissidente Ranke 3 permanente sur Mars, dès le début de la traque du transport d’Ouriage, début 2134.

 « Où en êtes-vous ? » Lui avait-il demandé, laconique. Et, jusqu’à son éviction des instances Chartistes, durant 2 ans, il allait tenir compte de toutes les demandes des Verts. Quelques nefs de transport médium, discrètement affrétées par leurs alliés, parvinrent à forcer l’embargo et à rallier Mars ces années là, leurs soutes chargées de matos.

 « Mes ancêtres se réveillent. » Lui avait simplement répondu la tchèque avant de commencer le cycle hebdomadaire des longs exposés de la situation vue de Mars.

 

2133 Mars 

Un an auparavant…….7 mois après l’arrivée en orbite planétaire.

 On réceptionnait les tout derniers contingents de colons venus du Transport en Grav 1 qui orbitait depuis 7 mois autour de la planète rouge. Faute de place au sol, les dernières centaines devaient attendre sur le gros vaisseau que tout le monde appelait l’Ouriage, du nom de sa Sainte Patronne, pilote et commandant de bord. La présence rassurante de la nef aidait les premiers martiens, les premiers Verts, à se donner du courage face à l’énormité de la tâche qu’ils avaient à accomplir. Une fois qu’elle serait partie, ils seraient vraiment tout seuls.

 Zdenka et Sean en scaphandres lourds de surface, comptabilisaient les récents arrivages de matériels. Les soutes d’Ouriage étaient enfin vides. Des tractors allaient et venaient pour peu à peu grignoter l’amoncellement de containers. Leurs pneumatiques laissaient de larges traces sur le sol caillouteux et pulvérulent. Ils disparaissaient dans la rampe numéro 7. La noria se répétait comme à chaque fois que les Verts livraient le nécessaire à chacun des trois sites d’implantation sur Mars. C’était à présent le dernier.

 « Les voilà ! » Dit Sean en pointant une main vers l’horizon. Zdenka baissa sa comm de casques pour mieux entendre les liaisons audio du central de point 3.

 A 8 km de la plate-forme de stockage, point 3 : le site d’arrivée des navettes passagers, prévu pour abriter un vrai cosmodrome plus tard. Les parachutes grands ouverts très haut au dessus d’elle, la navette tombait à une vitesse vertigineuse. Le pilote engagea ses rétros et lança la séquence d’allumage des fusées. Un gros boudin se gonfla en dessous de la carlingue. Au dernier moment, lorsque le sol ne fut plus qu’à quelques centaines de mètres les boosters à poudre entrèrent en action. Un gigantesque nuage de poussières, annulaire et bas sur le sol, s’éleva à l’horizon. L’arrivée ici, ces années-là, dans les débuts, secouait durement.

 Tout avait l’air de s’être passé convenablement. Dans une petite heure, le dernier Rank, le dernier Amélio, la dernière Druidesse, seraient au chaud et à l’abri dans le Terrier C en construction. Les 7400 humains s’installeraient pour de bon.

 L’ancien site de la station initiale, celle qu’ils avaient trouvé en débarquant ici il y’a 6 mois, bosselait l’horizon de ses dômes. Le paysage, ici une étendue plate, était d’une monotonie qu’aucun site terrestre ne connaissait. C’est une des toutes premières sensations qui saisissaient le nouvel arrivant : Mars pour ce qui est de sa surface, sur cet hémisphère nord en tous cas, était un désert d’une monotonie effarante. A plusieurs centaines de kilomètres, sur l’autre hémisphère, on tombait sur quelques reliefs importants. Ailleurs, des failles ravinaient l’étendue. Dans l’ensemble, la perspective de n’avoir que cela à contempler jusqu’à la fin de vos jours vous faisait immédiatement venir des images sinistres à l’esprit.

 Les Taupes continuaient leur travail d’excavation dans les trois réseaux de Terriers. A sur l’hémisphère sud, B sur la zone équatoriale et C, ici, au nord. Quatre équipes supplémentaires d’experts en creusement et de géologues avaient ouvert des puits d’extraction de minerais dans les régions limitrophes des Taupinières ainsi que les Verts nommaient les réseaux entre eux. Il y’avait environ 2500 colons par réseau.

 Deux des bâtiments d’accompagnement de l’Ouriage avaient été reconvertis en bâtiments industriels. Avec un minimum de présence humaine, les Pexs et les machines, là-haut, produisaient à tour de bras.

 « Je file à la cavité Lysistrate. » Dit Sean en s’éloignant vers le command car martien. Il roula vers la rampe 4, à deux kilomètres. Là-bas, les ingénieurs montaient ce qui allait constituer les premiers bâtiments de la Flotte verte. Zdenka héla un truck pour rejoindre la rampe 7.

 .............................................................

 Dans le mois qui suivit, l’Ouriage, salué par tous, reprit le chemin du retour vers la Terre. Les communications avec la planète bleue indiquaient qu’un autre contingent de colons était d’ores et déjà prêt à venir renforcer les pionniers.

 Zdenka, sortie pour l’occasion en surface, vit s’approcher deux silhouettes en scaphandres de grande taille.

 « Bonjour Ser Colonelle. »

 « Bonjour Trajan. Tu me donnes du Colonelle maintenant ? »

 « C’est ton nouveau grade…et puis c’est pour impressionner mon ami. Je te présente Yacine. »

 « Bonjour Yacine. »

 « Vous dites au revoir à la nef, Colonelle Placek ? » Demanda le grand gars.

 « Eh bien, oui. Exactement. »

 « Yacine est spécialiste en outillage spécialisé, ingénieur Pex, mais il est aussi expert en fouinage… comme moi.» - Dit Trajan avec obligeance.

 « Anthropologue ça s’appelle ! Cosaque ignorant ! ». Le corrigea l’autre échalas.

 « Bienvenue au Terrier C, monsieur l’anthropologue ! » Lui dit Zdenka avant de s’en retourner. Elle allait aux dômes où les biologistes finissaient de transférer les derniers résultats dont ils disposaient en matière de transplantation de l’écosystème terrien sur Mars. Les cavités destinées à la bio formation venaient d’être ouvertes. Il fallait impérativement accélérer le mouvement.

 « Où allez vous ? ». L’ami de Trajan la suivait.

 « Chez les bios. Vous savez, ceux qui étaient là à notre arrivée. » -  Dit Zdenka.

 « Attendez, je peux vous accompagner ? Ça m’intéresse aussi. »

 « Yacine, ici, à partir de maintenant, celui qui veut suivre, suit. Inutile de demander. On est plus sur Terra. Le Vert doit agir s’il le veut, l’autre Vert doit lui dire s’il ne le veut pas. C’est tout. Venez !»

 « J’arrive - c’est fou ce qu’on apprend plus vite en fréquentant les huiles et les VIPs, Ser Colonelle ! »

 

 « Zdenka, Sean, Trajan et les autres travaillèrent si bien que, pour les 30 ans à venir, plus aucune unité de la flotte verte ne serait acculée. Ouriage et son équipage seraient les premiers et les derniers de leurs martyrs. Ensuite, seules allaient être répertoriées des morts combattantes. Grâce aux lysistrates qui acceptèrent bientôt de procéder à l’Implantation de certaines d’entre elles comme pilotes, les Verts allaient disposer du moyen de riposter. En trois ans à peine, les efforts conjoints des Ranks dissidents martiens et de leurs alliées créèrent quelques Vraies patrouilles qui savaient attirer les ennemis dans leurs nasses. » Tiré des - Cahiers de Yacine – Presses universitaires Martiennes. (2329)

 

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Commentaires
Solar Ranks
  • Texte de science-fiction/anticipation. Les siècles prochains l'humanité sera t'elle moins stupide que pendant ceux qui ont précédé ? Quelques parcours humains, animaux et végétaux en 700 pages.
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