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Solar Ranks
22 décembre 2009

(réveil)

 

Neuf ans auparavant - 2142 - Dôme Lysistrate – Clinique de léthargie profonde. A 25 kms d’Oussourilsk. Terra.

 

Trajan venait d’arriver au dôme. La Commandante Jagelska était debout depuis avant-hier.

 « Comment vous sentez-vous Madga ? »

 La commandante, en peignoir blanc, regardait les liasses de rapports sur les récents événements, Terriens et Spatiaux. Elle se redressa.

 « Je suis fatiguée. Moralement je veux dire. Merci d’être venu Trajan. Ça vous fait quoi de rentrer au bercail ?» son visage mafflu tenta un sourire.

 Trajan était alarmé. La commandante avait visiblement eu du mal à faire l’effort de se pencher sur les rapports. D’après les Psy il s’agissait d’une réaction normale compte tenu des circonstances. Ils avaient observé la même difficulté chez d’autres patients en léthargie longue.

 « Je suis là depuis plus d’un an, Magda… » Rappela t’il à la lithuanienne.

 « Ah oui, c’est vrai… je radote ou je ne vous avais pas encore posé la question ? »

 Enfin une réaction. Trajan, toujours inquiet, ne se souvenait plus exactement de la teneur de toutes les conversations qu’ils avaient eues lors des 2 précédents réveils de la Lysistratéenne.

 « Peut-être pas de façon aussi directe Magda. Eh bien, disons que la perspective d’avoir à effectuer une rotation vers Mars l’année qui vient ne m’emplit pas de bonheur… Je donnerais presque un bras pour pouvoir me défiler en fait.» Avoua t’il.

 Magda le regarda cette fois avec acuité. Elle désigna les liasses posées sur la table basse. Trajan comprit que le sujet abordé suivant serait Zdenka. Pas étonnant, pensa t’il.

 « Selon ces rapports il est fort peu probable qu’elle revienne avant plusieurs années n’est-ce pas ? Sûrement pas avant dix douze ans. Est-ce vrai, selon vous Trajan ? » Lança la druidesse.

 Trajan sentit son cœur se serrer.

 « Si elle fait jouer tout son prestige, qui est grand… peut-être un peu avant. »

 La druidesse eut un grand geste comme pour écarter cette objection.

 « Neuf ans ou dix ans ou onze. Ça ne rime plus à grand chose de là où je me trouve. Cinq jours de vie consciente tout les 6 mois…J’en ai assez. »

 Elle resserra le cordon de son peignoir et écarta les bras en signe d’impuissance.

 « Je suis partagée, comme vous le voyez. »

 « Vous voulez revenir sur votre choix, Ser ? » Dit doucement Trajan.

 « Bien sûr que c’est ce que je veux. Soit je ne replonge pas, soit je veux qu’on me fiche la paix et qu’on me laisse dormir jusqu’à son retour. » Affirma Magda, péremptoire.

 « Qu’en pensent les toubibs d’ici ? Si je peux me permettre. » Demanda le watcheur.

 « Vous pouvez. Je vous considère comme mon ami, Trajan. » – les cheveux à présent fort longs de la druidesse oscillèrent et avec un mouvement d’épaule elle reprit – « Je ne sais pas encore à vrai dire. Enfin, les biotechs m’ont expliqué les possibilités théoriques au départ. Mais là je me sens très peu théorique. Si vous voyez ce que je veux dire. » - le grand gars eut un franc sourire qui fit du bien à sa détermination intérieure, Magda enchaîna  - « Accepteriez-vous de m’assister Trajan ? Et de rester comme témoin pendant que j’interroge les médecins ? Prenez votre temps pour me répondre, je vous prie. »

 Trajan se tourna dos à la lithuanienne, face à la grande baie de verre faiblement teinté. Le globe solaire illuminait les paysages des rives de l’Oussouri au loin. Les méandres anastomosés luisaient dans les oranges. Sa décision ne lui demanda que quelques minutes.

 « J’accepte. » Dit-il calmement sans se retourner.

 « Merci Trajan. Il y’aura forcément au moins deux médecins et je ne me sens pas de me lancer en solo dans cette entrevue…pas dans mon état  émotionnel. »

 « Je comprends. » Dit-il. Il pivota et attendit la suite.

 « Je m’arrangerais, quelque soit l’issue, pour que Zdenka ne soie pas mise au courant de votre participation à cette démarche...qu’en pensez-vous ? » Glissa Magda, faussement dégagée.

 « J’en pense que ça n’a pas d’importance de mon point de vue. » Les rides autour des yeux du roumano ukrainien se creusèrent nettement. Magda s’observa elle-même un instant pour vérifier : « Ce grand type, qui avait à présent l’apparence d’un homme du même âge qu’elle, forçait son respect – Pourrait-elle considérer qu’il l’attirait aussi en tant qu’homme ? » « Certainement ! » pensa t’elle avec conviction. Elle se renseigna par réseau com interne pour connaître les disponibilités les plus rapides des toubibs biotechs. 

 

Deux heures plus tard – même endroit. Magda, Trajan, une spécialiste psy et un médecin réanimateur léthargiste.

 « Si vous optez pour un réveil prolongé est-ce… définitif ? » Commença la psy.

 « Non, ça ne l’est pas. Je ne sais pas comment réintégrer avant de reprendre pieds dans le réel. »

 « Le réel vous savez… » Fit imprudemment la psy avec une moue, Magda la coupa d’un ton sec.

 « Non Docteur. Ça ne m’intéresse pas, ça. Contentez vous de m’exposer les données techniques et biologiques du problème, s’il vous plait. » Avec un air aux limites de la colère.

 Les deux docteurs regardèrent brièvement Trajan, assis un peu en retrait. Comme il se contenta de faire un geste évasif de la main, ils raffermirent leur pose en appuyant leurs mains sur la table devant leurs dossiers.

 « Vous pouvez choisir un réveil prolongé de quelques années, mais votre éventuel retour à la léthargie profonde devra être dans ce cas entièrement réexaminé par de nombreux spécialistes. » Dit l’anesthésiste biotech.

 « Le problème est le suivant Ser, votre capital prolongation vitale devra être réajusté si vous choisissez de rester parmi nous plus d’un an. Et ensuite il faudra attendre au moins trois ans avant d’envisager une reprise de la léthargie. C’est le minimum après une amélio prolong un peu sérieuse. » Ajouta la psy qui connaissait son affaire en matière de compatibilité Ranke Amélio.

 « Et au-delà ? » Demanda Magda d’un air interrogateur.

 « Au-delà des ces quatre ans ? » fit la doctoresse.

 « Oui. » Confirma Magda. La psychiatre consulta son collègue du regard avant de reprendre.

 « Je crois pouvoir affirmer Ser, que votre corps vieillira en temps biologique d’une dizaine d’années puis se stabilisera pour quelque dizaines d’années. En principe un trentaine. »

 « Donc dans 40 ans j’aurais environ 60 ans. » Magda avait du mal à ne pas pouffer. De telles conversations paraissaient forcément surréalistes. Ce fut le petit médic léthargiste qui répondit.

 « On peut estimer le problème en ces termes, Ser, selon notre expérience. Compte tenu des modifications apportées à votre organisme vous seriez à peu près Amélio Rank 2…en terme d’équivalence biotech naturellement.» L’anesthésiste ne brillait pas par son sens de l’humour.

 « De combien avez-vous besoin de temps pour me « réajuster » au cas où je choisirais cette option ? » Magda jeta un coup d’œil à Trajan, il avait les deux mains jointes sur sa bouche. Lui non plus n’appréciait guère les biotechs. Il le lui avait dit.

 « Si tout doit être accompli dans les règles de l’Art, un mois, deux au maximum. »

 « Je vous ferais parvenir ma décision demain alors. Merci de votre patience. » Conclut Magda en inclinant deux fois la tête.

 Le deux médecins, soulagés d’en avoir fini avec ce cas délicat vu la personnalité de la Commandante, se levèrent de leurs sièges. Après avoir serré leurs mains, ils saluèrent et sortirent. Quand ils furent à nouveau seuls, Trajan demanda à Magda Jagelska apparemment de retour parmi les vivants.

 « Voulez-vous que je reste ou désirez vous rester seule, Ser Commandante ? » Il gardait les yeux braqués vers le bas.

 Magda songea que rester ici ne servait vraiment plus à rien. Sortir ! Elle tapa dans ses mains.

 « Trajan, cher Rank 3… m’accompagneriez-vous dans un endroit hors de ce fichu dôme ? Un lieu où malgré l’heure tardive on peut se faire servir quelque nourriture en échange de jolies couronnes solaires ? » Dit joyeusement la druidesse avec les yeux qui pétillaient.

 Trajan, en l’état, s’était déjà levé. Il alla chercher ses affaires pendant que Magda s’habillait chaudement. Ils sortirent de la clinique en plaisantant gaiement et s’engouffrèrent dans le break de Trajan. Par la fenêtre de son bureau administratif, la toubib psychiatre les observa ensuite qui s’éloignaient vers la sortie. Une passerelle routière mobile enjambait les franges de ce dôme hospitalier très tranquille. « Ils seront en ville dans vingt minutes. », pensa t’elle en soupirant. Elle lâcha le rideau.

 « Il y’a des jours où je me fatigue de ce boulot. » dit-elle à l’anesthésiste qui finissait de remplir ses formulaires. Ce dernier hocha la tête, morose. Il interprétait un peu de travers la remarque de sa collègue psychiatre. « C’est sûr, chère collègue, ils deviennent impossibles ! Surtout avec les appuis dont ces deux là jouissent en haut lieu...Nous sommes considérés… comme de vulgaires charlatans ! » Souffla t’il avec le plus grand sérieux avant de sortir pour rentrer chez lui.

 « Les spécialistes léthargie sont vraiment parfois d’un lugubre… » Se dit la doctoresse qui avait retrouvé toute sa bonne humeur, avant de sortir à son tour en éteignant la lumière.

 

2142 - Oussourilsk – un hôtel – Magda, Trajan

 Magda caressait doucement le ventre de Trajan. « Tu es mon Saint-Georges personnel… » Lui glissa t’elle à nouveau à l’oreille d’un air terriblement séducteur. Les draps sentaient bon le sexe, et les traces de leurs ébats jalonnaient le sol de la chambre sous forme de vêtements et de sous-vêtement épars. Trajan passa un bras sous les reins de Magda et lui effleura les seins de son autre main. Magda attrapa l’homme en lui entourant le bassin des ses cuisses. Elle l’attira vers elle. Trajan l’enlaça et ils refirent l’amour délicieusement en prenant tout leur temps. La druidesse le fit basculer sur le dos et resta ainsi à osciller sur son sexe en légères saccades humides. Ses longs cheveux gris pâles, dénoués, tombaient en cascade et caressaient les bras et le torse de son amant. Le visage de la Lysistrate fut parcouru de frémissements de plaisir. Elle jouit doucement, la bouche tremblante. Trajan était subjugué par la beauté animale et humaine de ces instants. Magda l’attira à elle dans ses bras. Son bas-ventre et ses reins immobiles. Leurs deux sexes lovés l’un dans/autour de l’autre échangeaient encore des caresses profondes. Magda se mit sur un coude contre un oreiller et lui pelota tendrement les testicules. « Je suis ton Saint-Georges ».- expira t’il. Trajan laissa son corps repartir sur le dos contre le matelas, épuisé. Magda vint appuyer sa tête sur son épaule en lui embrassant le cou et le visage sans cesser son massage. « Je suis une louve ravie.- Dit-elle en souriant avec une moue rassasiée - et qui se sent très chanceuse, mon bel amour. ». La druidesse s’endormit bientôt, blottie contre le long corps de l’homme.

 Le watcheur laissa Magda s’enfoncer dans un sommeil profond. Lorsqu’elle commença à ronfler un peu, il la recouvrit de la couette et se leva pour fumer une cigarette. Il n’avait plus du tout envie d’aller vers Mars. Il savait que Zdenka et Magda ne s’était pas vouées de fidélité sexuelle particulière. La question n’était pas du tout là. C’est seulement que Trajan tenait à vivre les temps futurs aux côtés de cette satanée lysistratéenne aux cheveux gris, pleinement. Le reste pouvait aller au diable et deux fois plutôt qu’une. Ils avaient une quinzaine d’années devant eux. Il irait plaider sa cause auprès de Sean et de Shaarka aussitôt qu’il le pourrait. Il ferait jouer ses anciens rapports avec Xu s’il le fallait – Se promit-il. Il se recoucha auprès de Magda et la rejoignit dans le sommeil. Le lendemain, ils firent à nouveau l’amour au réveil, puis, après un petit déjeuner très robuste, ils retournèrent au dôme.

 Ser Jagelska et Trajan restèrent à Oussouriilsk durant le mois suivant. Les médecins Biotechs fignolèrent une Amélio prolongation dont ils semblaient très fiers sur la Commandante.

 

 

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Solar Ranks
  • Texte de science-fiction/anticipation. Les siècles prochains l'humanité sera t'elle moins stupide que pendant ceux qui ont précédé ? Quelques parcours humains, animaux et végétaux en 700 pages.
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