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Solar Ranks
7 janvier 2010

(bloody drama)

 

Chapitre 10

 

« Bloody drama ! »

 

Terra  - Colombo  - Sri Lanka -  (Quelques heures avant l’arrivée des premiers invités).

 

Les multiples tentatives de contact pour un entretien désarmé en terrain neutre n’avaient rien donné. Ces gens étaient décidément les tenants d’un entêtement farouche et obtus. La longue et sanglante histoire de la lutte de leur peuple pour sa liberté leur donnait – semblait-il – tous les droits. Leur équipe avait rallié le Sri Lanka incognito et en ordre dispersé cette semaine.

 Fatou Jamsaya avançait d’une démarche tranquille en longeant le mur d’enceinte. Suong suivait sa progression par bonds, sur l’autre trottoir, un court fusil Maser en bandoulière devant la poitrine et un fusil d’assaut au dos. Magda Jagelska les couvrait attentivement, au fusil à lunette, depuis le Van stationné au carrefour.

 « Nam est arrivé en position sur le toit, il est posé, Magda. » – Transmit Suong, arrivée en vue du portail, planquée derrière une grosse poubelle.

 Ser Fatou Jamsaya portait une combinaison d’agent gouvernemental des télécommunications. Elle vérifia ses armes dans les poches de sa salopette et sonna à la double porte. Les caméras pouvaient bien sûr la visualiser - c’était nécessaire. Les scanners de la villa fortifiée en revanche ne purent détecter la présence des armes diverses, puissantes et sophistiquées, qui venaient de les ceindre d’un anneau implacable. Leur groupe y avait soigneusement veillé.

 « Oui ? C’est le service de maintenance Vaev. » - Répondit Fatou avant de franchir le portail.

 Huit gardes foudroyés au Maser, puis paralysés, plus tard, les deux premiers membres du commando se faufilèrent en courant vers l’habitation principale du parc privatif de cette banlieue de Colombo. - Les sept amis de Shaarka n’avaient pas tellement le cœur à la rigolade. -  Magda poussa à fond le Van dans l’allée centrale du parc en bousculant au passage les deux vantaux de l’entrée. La Commandante Lysistrate eut juste le temps de s’arrêter à l’abri d’un petit bâtiment annexe. Le véhicule faisait crisser ses pneus sur le gravier que déjà Takashi, Ondine et Juan Muro en jaillissaient, porteurs cette fois-ci, en plus du reste, de redoutables fusils d’assaut. Autour de la maison un feu nourri éclata qui dura une dizaine de minutes. Le vieux Trajan et Magda descendirent à leur tour et montèrent vers la villa à présent silencieuse.

 Sept mois auparavant, les services scientifiques avaient fini par déterminer qui avait vendu le missile qui avait occit  Shaarka Mukherjee en 2200. Comme il arrive souvent en pareil cas, les services de police, y compris ceux de la Charte, déclaraient ne pas pouvoir atteindre ou assigner en justice les personnes en question. 

 « Comment ça intouchables ? Intouchables ! Car protégés par des gens trop hauts placés - disent-ils à chaque fois en pareille circonstance ! Et le sort de la colonie Verte alors ? Et Mars ? Par Saint-Georges et par Saint Michel !!!» - avait mugi Trajan Louniecko en apprenant l’information dans les locaux de la délégation Verte de Vancouver. Il tapait du poing sur son bureau de Délégué Général Vert sur Terra. Il ne devait plus décolérer jusqu’à sa mort.

 Sans pour autant réactiver le Motif dans son ensemble, chose relativement impossible à faire après 20 ans de dissolution, il avait comm en crypté à tous les anciens du noyau dur de l’ex mouvement semi clandestin.

 Ensemble, ils avaient contacté le très vieux James Rivers, retiré des affaires depuis bien longtemps mais toujours impliqué officieusement dans les allées du pouvoir mondial de Terra. Bien que quasiment mourrant de vieillesse, le vieil Amélio ancien Président de Northamérica, âgé de 175 ans,  les avait productivement et volontiers aidés.

 Demander aux marchands d’armes : « à qui ils avaient vendu le petit missile ? », leur avait demandé six mois de préparation. Magda, ancienne dirigeante de brigade Lysistrate, s’arrangea pour passer des coups de fils à cette occasion à ses anciennes subordonnées.  Maintenant disséminées dans la plupart des Dômes Lysistrates de Terra, elles occupaient souvent des postes importants chez les druidesses. Après une conférence secrète des Hautes Vestales pour les autorisations de feu, les anciens membres du Motif avaient décidé d’agir.

 ……le mois précédent  – Terra.  Australie Centrale……….

 La région centrale, déjà brûlante, devenait intenable. Là où jadis le bush maintenait vaille que vaille son emprise sur le paysage on voyait à présent un des déserts les plus arides de Terra. Les formations buissonnantes avaient cédé la place au roc et au sable. Les lieux n’étaient toutefois pas entièrement vides, les techniques de tunnellerie avaient fait des bonds de géant sur la planète bleue aussi. Parmi les scorpions et les serpents, quelques Cavités avaient été forées. Centres d’études scientifiques, riches hurluberlus, ou bien, comme ici, où les maffieux crurent que c’était une opportunité pour y fomenter dans la quiétude leurs projets pernicieux.

 Car ce n’était ni le soleil implacable, ni les scorpions, ni les serpents qui avaient couché au sol ou obligé à déposer les armes la centaine de soldats alentour. Non. C’étaient les effectifs Lysistrates de quatre Dômes des franges du grand désert central, accompagnées par quelques Ranks que nous connaissons bien.

                                                                                   

 Après une demi heure de combats intensifs, en sous-sol, les trois dirigeants du consortium de ventes de technologies et d’armes regardaient sans moufter les fusils braqués vers eux. - Bah ! Leurs bizness étaient dangereux. Ils n’étaient pas gens facilement impressionnables. Bon, certes, les assaillantes avaient vaincu leurs pelotons de défense…Ces Druidesses ! - Avaient-ils conclu, chacun de leur côté, matant en connaisseurs avertis les armements brandis et le fait que les trois-quarts des faces cagoulées en face d’eux étaient indéniablement féminines.

 « Et alors ? » Avait osé l’un d’entre eux, une belle femme Amélio à l’air impassible, assise les mains sur la tête. Ses deux associés, deux hommes dans la même posture scrutèrent à leur tour leurs vainqueurs cagoulés. Seul Trajan était tête nue, il s’avança, visage clos, vers les captifs.

 « Alors regardez bien ! – Leur avait-il dit en leur tendant un screen portatif de grande taille.

 En mosaïque, sur l’écran que brandissant le Roumano Ukrainien devant leurs yeux, les trois salopards, carrés dans leurs fauteuils, eurent le très grand déplaisir de voir treize de leurs plus importants spots de stockage et de production de matériels, répartis sur tous les continents. Un bâtiment ou une cache souterraine disparut ensuite sur chaque icône dans une explosion dantesque. Magda, Trajan et les Nguyen avaient veillé à pré positionner des alliés à eux partout sur le globe. La note de télécoms de Magda Jagelska avait été plutôt du genre…salé.

 « On n’est pas venus ici pour menacer vos personnes ! – Leur jeta Nam derrière sa cagoule – « Ni pour jouer aux justiciers avec vous ! On s’en tape. Vous êtes interchangeables et d’autres n’attendent que de reprendre vos places - vos gueules. Infos ! Et on repart sans faire d’histoires supplémentaires.»

 À l’écran, trois nouvelles explosions embrasèrent brusquement trois carreaux de la mosaïque.

 « Arrêtez ! Qu’est-ce que vous êtes venus faire ici ? » – Hurla la femme, blême, se dressant hors de son fauteuil en les apostrophant, les mains toujours croisées sur la nuque.

 « Savoir à qui et dans quelles conditions vous avez vendu certains projectiles. » Posa Trajan.

 Magda, en faisant l’effort de ne boiter que légèrement, sortit du groupe de ses sœurs Lysistrates réquisitionnées pour ces heures de vengeance. Elle posa un feuillet devant eux :

 « Missile série 6744 – RJ. Exemplaire Unit 399976. Vite ! »

 Deux portions de sites de stockage d’explosifs disparurent à nouveau dans une mer de flammes sur l’écran.

 Les trois associés se saisirent de leurs Unités Vaev portables et pianotèrent dessus à toute vitesse. «  Ils ne perdent rien pour attendre pour attendre, ceux-là ! On ne nous menace pas de cette manière. Ils sont déjà liquidés !  Pensaient-ils tous trois activement.

 « Quelles garanties avons-nous que l’information livrée ne signifiera pas une sentence de mort pour nous trois ? » Demanda un des deux types, un caucasien aux cheveux bruns, en levant le regard vers les intrus cagoulés après avoir pianoté sur ses datas.

 Les yeux bleus de Magda battirent des paupières brièvement lorsque la rafale de son pistolet mitrailleur le coupa pratiquement en deux. Il n’eut qu’un bref gargouillement en s’effondrant en arrière. Les deux autres, comme mus par des ressorts, s’étaient levés d’un bond, d’instinct.

 « Aucune ! » - Dit Trajan au deux survivants – « Dépêchez-vous, au lieu de vous poser des énigmes absurdes et inutiles ! Nous savons comment vos trois consortiums sont imbriqués entre eux et avec qui ils sont liés. Vous nous prenez pour des pipeaux d’enfant ? Vous avez tort, vous êtes dans une merde noire !».

 Trois nouvelles explosions, virtuelles celles là, apparurent sur le screen que Trajan continuait obstinément à brandir devant leurs paires d’yeux pendant que le sang de leur coreligionnaire en ventes d’armes inondait le cuir du fauteuil, et le tapis, d’une grosse tache rouge sombre.

 

« Ces deux stocks là sont toujours intacts et entiers…Ce n’était qu’une simulation. C’est ce qui va leur arriver bientôt ! Nous savons à peu près combien de pertes vous êtes capables d’encaisser avant que ce ne soient vos associés eux-mêmes qui se décident à vous descendre. » Leur dit à nouveau Nam en grondant d’une voix très menaçante en anglais.

 La femme du début se rassit prudemment dans son fauteuil. Elle se saisit de son propre wokscreen et leur dit : « Unit 399976… appartient à un lot que nous avons vendu aux Tamils de Colombo. Je peux vous dire qui et comment.»

 Ils leur avaient ensuite fourni pas mal d’informations sur les conditions de la vente, les transactions, etcetera, etcetera. Leur groupe d’anciens membres du défunt Motif avait tout consigné et vérifié sur place. Il en ressortait que la théorie d’ultimes héritiers des assassins de Titan oeuvrant en sous-main sur Terre pour exercer leur vengeance et nuire à Mars tenait bel et bien la route. Cela ne suffisait pas, hélas, pour remonter jusqu’à ces commanditaires réels de l’assassinat de Shaarka et de tant d’autres…Dommage !

 Après deux heures d’âpres discussions, ils liquidèrent finalement l’homme et la femme pour protéger leurs arrières et organisèrent l’Opération Colombo. Malheureusement, les phases préliminaires n’ayant rien donné, c’est la phase ultime de passage en force qu’ils étaient en train de mener à bien avec leur petite équipe réduite au minimum. Des questions confidentielles devaient être posées à ceux qui avaient été manipulés pour assassiner l’ex Capitane Mukherjee s’ils voulaient avoir au moins une chance de reconstituer le puzzle.

 …….. Colombo……2216… 

 Nam se laissa tomber le long de son filin de rappel et nettoya l’étage supérieur du bâtiment à coups de grenades paralysantes. Les autres gardes de la villa ouvrirent aussitôt le feu. Quelques minutes plus tard, deux membres de leur groupe d’intrusion braquaient la dizaine de personne réunies dans le grand salon de la villa. Nam, qui dirigeait toute l’opération, transmit l’information aux autres depuis sa position. Il exigea aussitôt que Magda soit privée de toutes ses armes létales avant de monter à l’étage. Ondine reçut le message et se rapprocha de la Commandante Jagelska, ses yeux bleus/verts et jaunes ruisselants de larmes.

 « Ser Magda ! Il est mort, on ne peut rien y faire. » - Elle s’avançait vers la lithuanienne qui tremblait sans sembler s’apercevoir de ce qui l’entourait. Trajan, criblé de balles, venait d’expirer, dans le hall du rez de chaussée de la villa. Il était entré au mauvais moment, un des défenseurs couchés au sol n’était ni mort, ni hors de combat. Fatou Jamsaya, accroupie près de son corps, lui fermait les paupières d’un geste rapide et le couvrit provisoirement de sa veste. Ondine déposa d’abord son propre fusil d’assaut, fumant, qu’elle tenait braqué vers le bas. L’ex Commandante Jagelska, toujours immobile, la regardait, puis elle dégagea rapidement elle aussi son arme de son harnais/baudrier et la tendit à Ondine Onomoro.

 « Tiens, Ondine, prends ! Et arrêtes donc de douter en ton cœur de la validité des druidesses et du mouvement Lysistrate. Cela aurait fait plaisir à…Trajan. ». Lui dit-elle avant de se laisser fouiller au corps par l’ex lieutenante. Ondine ne lui laissa que sa canne et elles montèrent vers l’étage où Takashi et Suong sécurisaient le groupe des cibles, l’élite dirigeante de ce mouvement d’auto défense Tamoule.

 

Les captifs devant eux, visages sombres, fermés, les regardaient d’un air uni et entendu.

 Oui : Ils avaient éliminé Ser Mukherjee. Celle la même qui, dans un raid aérien surprise au phosphore de l’aéronavale indienne datant de près de 160 ans, avait tué tant des leurs…Leurs esprits étaient tranquilles. Le paradis des âmes simples et pures les attendait, croyaient-ils. Peu à peu, ils comprirent qu’ils survivraient fort probablement à l’entretien qui débuta alors.

 Les anciens du Motif les convainquirent patiemment de ce qu’ils s’en fichaient complètement. Magda Jagelska, privée de ses armes de guerre, fit même des prodiges, argumentant aux côtés de ses camarades pour démontrer aux Tamils qu’ils n’avaient été que de simples dupes intégralement manipulés et crédules. Dans cette affaire là du moins. Les deux mains posées sur le pommeau de sa canne, elle réfutait les arguties des chefs tamils unes à unes :

 « Allons donc ! C’est ce même Autrui que nous nommons dans notre aveuglement Dieux, Révolution ou Fuite en avant ou bien Tradition ou encore Fidélité que nous recherchons aujourd’hui. Nous refusons d’accepter passivement que de simples petits humains se laissent aller jusqu’à utiliser tout cela pour leurs intérêts mesquins. Etes-vous donc des soldats volontaires si stupides, messieurs et madame ? » Dit elle en soulignant son propos par de légers mouvements de la main.

 Depuis quelques échanges verbaux, le groupe des tamils était agité de mouvements.

 « Les gens qui nous ont contacté il y’a quinze ans avaient l’air bizarres, oui, et aussi plus dangereux que des serpents, Ser. Attention ! Votre tentative de vous en prendre à eux risque de mal tourner ! » Dit finalement d’une voix égale et digne un des participants à cette étrange conférence au milieu des cadavres. Il secouait doucement sa tête d’avant en arrière faisant osciller la masse de ses longs cheveux blancs de neige.

 « Non ! Je ne suis pas venue jusqu’ici pour assister ou croire à je ne sais quel foutu cérémonial entre combattants ! – Hurla soudain Magda Jagelska avant d’éclater en sanglots - Vous venez de tuer mon mari. Qu’aucun de vous ne s’imagine jamais pouvoir s’en dédouaner. Ni devant dieu, ni devant moi.». Elle brandit sa canne puis se ravisa. L’assemblée restait muette et figée. Ses larmes s’apaisèrent peu à peu et son dos se voûta très perceptiblement.

 La canne de Magda ne lui servirait plus désormais qu’à s’appuyer dessus. Elle regarda tristement les hommes et la femme rassemblés devant elle, passa le long du mur du couloir et s’en alla se rasseoir. Elle assista à la suite des échanges sans bouger, lèvres closes, avec une expression absente dans le regard. Pour finir, une moitié des captifs, graduellement, accepta de coopérer. Les autres, furent simplement placés sous la garde de Fatou et de Juan Muro dans une pièce à part le temps que l’échange d’informations soit terminé.

  « Ser Jagelska » aurait voulu que Zdenka Plackova surgisse magiquement des murs pour l’emporter avec elle en la prenant dans ses bras. La lysistratréenne en avait tout à coup plein le dos de toutes ces conneries terriennes et humaines, pleines de haine. Trajan n’était plus là.

 « Magda Jagelska, malgré son aversion proverbiale pour l’apesanteur et l’espace, devait embarquer dans la vacation Rotation martienne suivante, en 2217. Après avoir cédé ses droits sur les Isbas finnoises aux Nguyens, à Issa, à Zdenka et à Tsourhna Barnes. Arrivée chez nous en 2218, elle laissait les amis de Terra s’occuper de tous ces problèmes, dont elle-même n’avait plus rien à faire. Son œuvre ici, courte mais puissante, fut totalement intégrée et amalgamée au patrimoine Vert commun.»

 - les cahiers de Yacine.

Magda

 

 

 

 

 

(Magda Jagelska l'année de son départ pour Mars)

 

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Solar Ranks
  • Texte de science-fiction/anticipation. Les siècles prochains l'humanité sera t'elle moins stupide que pendant ceux qui ont précédé ? Quelques parcours humains, animaux et végétaux en 700 pages.
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