Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Solar Ranks
20 décembre 2009

Solar Ranks

 

 

 

 

 

 

SOLAR RANKS 

 

 

(trilogie de science-fiction)

 

 

Par  Olivier  VOLF

 

 

 

 

 

 

(Années 2060 - 2130)


 

Prologue : LA  TOURBIERE


 

 La tourbière trônait sur sa propre masse depuis des temps immémoriaux. Les herbivores égarés par un destin funeste y étaient incorporés de temps à autre et même quelques hommes que la malchance des temps ou l’imprudence conduisaient jusqu’au plateau isolé sur lequel elle régnait. A certaines époques, des éleveurs villageois taillaient dans ses flancs quelques mottes qu’ils mettaient à sécher au vent pour se chauffer. Ceux qui bivouaquaient régulièrement érigeaient aussi de petites huttes avec les mêmes briques de tourbe séchée. Cela ne durait jamais bien longtemps. Dans ses fonds humides, les rares arbres qui parvenaient de ci de là à pousser finissaient tous par s’éteindre comme des cierges et les formes tourmentées de leur agonie acide restaient dressées comme autant d’apparitions végétales maladives. Seules les petites bêtes trouvaient ces lieux favorables. Le lynx, exception parmi les lourds, venait parfois y dessiner une trace à coups de canines précis grâce à la merveilleuse largesse de ses pattes. Les renards, pourtant plus légers, enfonçaient leurs jambes dans le suc brunâtre et ne revenaient que lorsque les frimas rendaient le sol plus dur mais aussi plus stérile. Certaines mares libéraient leur sécrétions gazeuses et s’embrasant spontanément par frottement électrostatique elles lançaient de magnifiques flammèches bleues ou vertes qui faisaient détaler même l’ours placide. Eh oui, les souches creuses de ses marges, idéalement éloignées des activités industrielles, plaisaient aux ours, particulièrement entre deux périodes d’hibernation.

 Lorsque les êtres humains commencèrent à forer la roche tendre à trois cent mètres de profondeur, la tourbe gorgée de liquides frémit sous la vibration des trépans. Sur ses 280 hectares spongieux, elle encaissa vaillamment les chocs sismiques des explosions souterraines. Après quelques mois de bourdonnements des excavatrices, le calme revint. L’homme avait parfois de drôles d’idées. Des sœurs tourbières l’avaient avertie jadis par pollens interposés qu’elles étaient découpées entièrement, surtout celles qui couvaient paresseusement d’anciennes sœurs devenues mère-lignites. L’homme, avide de charbon faisait subir le même sort à la tourbe. Il suffisait de goûter la saveur de certaines cendres apportées par le vent de nord-est  pour savoir ces choses.

 Mais il n’y avait pas de lignite dans l’épaisseur de son plateau, ni de charbon en dessous, de cela elle était certaine. Depuis le temps qu’elle vivait en équilibre ici, elle savait bien que la nature des roches dont étaient faits ses horizons profonds changeait, tour à tour dure et poreuse puis molle, glissante et imperméable. Elle recyclait ces strates si lentement, non, non et non, s’il y’avait eu autre chose, elle l’aurait su !

 Puis, aussitôt le silence cavernicole tant soit peu revenu, elle fut troublée par d’agaçantes incursions dans ses soubassements. Les intrus l’enserraient dans un réseau de tuyauteries compliquées, sèches ou humides. Et ce fut la colonisation ! Une colonisation indolore : les nouveaux venus appréhendaient tous les paramètres de ses parties constituées. Cela ne faisait pas mal. Mais quel sans-gêne !

 Des animaux mécaniques quelquefois si petits qu’ils se faufilaient entre les pattes des pucerons parcouraient à présent son grand corps et rapportaient tout ce qu’ils glanaient à d’autres êtres biomécaniques plus gros. Des pseudo araignées, pseudo têtards, pseudo musaraignes, grotesques parodies baladaient leurs pattes partout, ramassaient, creusaient, importunaient les résidents habituels. Une vraie folie. Ils couraient de l’un à l’autre, se parlaient dans des langues que personne ici ne comprenait, ni les fourmis, ni les vers, ni les poissons

  Des galeries fines de la roche sortaient des insectes de métal et de carbone, encore et encore. Ceux-là opéraient des razzias périodiques, pourchassaient les dytiques, disséquaient lichens et champignons. La tourbière sentait également la présence dans les cavités profondes d’êtres pensants encore plus gros, froids et analytiques.

 Les invasions et la colonisation faisaient partie depuis toujours de son existence, pourquoi pas eux ? La tourbière n’était pas équipée pour l’égoïsme, juste pour la survie. Dans ses pâtis humides les bergers continuaient d’emmener périodiquement leurs brebis. Pourquoi s’en faire pour de si piètres événements ?

 Elle cessa quelques années de se préoccuper du nouveau pays sur lequel le destin l’avait placé. Après quelques dizaines de saisons, ces nouveaux habitants venus du dessous ne se contentèrent plus de la visiter et de s’informer. Ils prélevaient toujours des échantillons partout, de plus en plus petits. Mais voilà à présent qu’ils revenaient aussi avec des « morceaux » de végétaux et d’animaux modifiés. Ils procédaient à des greffes sur des fractions de ses populations biologiques et semblaient très intéressés par leurs développements ultérieurs. Plus le temps passaient plus les colonisateurs devenaient petits  et plus ils proliféraient aussi.

 La tourbière eut très peur que ces expériences inquiétantes modifient son Ph. De nombreuses sœurs avaient ainsi disparu en perdant leur acidité, devenant de vulgaires landes sèches ou se transformant au contraire en de ridicules marais. Les tourbières en équilibre climaxique aussi durable que le sien étaient rares, elle le savait, surtout depuis que les hommes aménageaient la surface de la terre à leur profit.

 Mais curieusement leurs interventions respectaient scrupuleusement l’acidité et les composants de ses fluides et de son sol. Elles aidaient même à restaurer son harmonie aux endroits où celle-ci semblait sur le point de s’amoindrir. Tout cela était véritablement très bizarre.

 Si elle avait pu entendre les messages que les intrus échangeaient entre eux, si les signaux que les cavités profondes émettaient vers les lointains lui avaient été compréhensibles, elle aurait pu en savoir plus. Mais elle n’était qu’un modeste biotope, bien incapable de décrypter ces gammes de fréquences électromagnétiques.

 Peut-être n’aurait-elle pas été insensible, dans le cas contraire, d’apprendre qu’elle n’était pas la seule à faire l’objet d’une occupation aussi attentive. Sous d’autres latitudes, de petites mangroves, des secteurs dunaires et désertiques, des portions de récif corallien, des grottes submergées aux biotopes anaérobies étaient patiemment auscultés et testés.  

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
G
Olivier je ne sais pas si on t'a dit mais j'avais répondu à ton mail et j'ai eu un message de retour de ta boîte mail. Je peux te contacter autrement (réponds moi via mail, moi je te reçois par contre ^^)<br /> <br /> A +<br /> <br /> Greg
H
donc ta nouvelle adresse est "http://solar.ranks.canalblog.com" ou http://solarranks.canalblog.com" ?
Solar Ranks
  • Texte de science-fiction/anticipation. Les siècles prochains l'humanité sera t'elle moins stupide que pendant ceux qui ont précédé ? Quelques parcours humains, animaux et végétaux en 700 pages.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Publicité